Selon les statistiques fédérales, les personnes résidant en Suisse vont en moyenne tout juste plus d’une fois et demi au cinéma par an!

Pour la famille de Letizia (19 ans) en revanche, il est de tradition d’aller ensemble au cinéma de Cossonay environ quatre fois par an. «On y va assez souvent quand il y a des films qui nous intéressent. En plus, cette salle régionale programme plusieurs longs métrages d’actualité dans un même weekend. C’est très appréciable.»

Audience stable à Cossonay

Chacun y va aussi de son côté, avec ses amis. Pour les jeunes, la situation des deux cinémas de la région est pour le moins pratique d’autant que les films projetés qu’ils aiment – type Marvel ou encore Star Wars – y sont rapidement à l’affiche.

Faisant exception par rapport à la majorité des cinémas romands, qui voient baisser la jauge de leur public, la fréquentation du cinéma de Cossonay est restée au même niveau que l’année précédente.

Au cinéma Casino de La Sarraz, membre du groupe Cinérive, la tendance de baisse se poursuit depuis trois ans, mais l’arrivée de «Bohemian Rhapsody» en fin d’année a énormément boosté le nombre d’entrées, devenant avec une large avance le film le plus populaire de l’année, avec 790 entrées enregistrées.

Le film étant toujours à l’affiche en 2019, il a dépassé les 1000 entrées en ce mois de janvier.

2019 : une grande année

Il est vrai que tous ces grands films américains sont une valeur sûre pour les distributeurs, particulièrement les films musicaux, qui ont eu un grand succès auprès des critiques et du grand public en 2018 (A Star is Born, Bohemian Rhapsody).

Du côté de Cossonay, notons une programmation marquée envers les comédies françaises ainsi que les documentaires suisses, notamment À l’école des philosophes de Fernand Melgar, le fameux réalisateur lausannois. Sans oublier les films familiaux, qui sont aussi une source de revenus autant pour les cinémas de Cossonay et La Sarraz. Parmi les films qui ont bien marché, on citera: La Ch’tite Famille, Le Crime de l’Orient Express et Tout le Monde Debout.

Malgré l’absence de grands films porteurs en 2018, les deux cinémas régionaux gardent la tête haute pour 2019. Ce millésime promet en effet d’être une grande année pour les distributeurs, avec la sortie de films- évènements chez Disney, que ce soit les remakes de leurs grands classiques, tels que Le Roi Lion et Aladdin, ou la continuation de leurs succès plus récents, notamment La Reine des Neiges 2 et Star Wars IX.

Tout de même, l’embarras du choix reste toujours une difficulté importante quand il s’agit de faire les sélections de films, car les répercutions se font particulièrement ressentir dans un cinéma mono-salle indépendant, tel que celui de Cossonay: «Devrait-on faire passer des productions indépendantes le vendredi soir afin de promouvoir des films originaux? Ou aurait-on meilleur temps de passer les grands blockbusters et autres films populaires?» Voilà donc certaines questions essentielles que doit se poser le gérant du cinéma, Pascal Miéville.

Cette difficulté de sélection est matérialisée par un mix entre les productions pour le grand public, qu’il nomme «Films A», des films qui sont une source nécessaire de revenus pour la salle, et les «Films P», dont la cible est les cinéphiles, qui sont les clients les plus fidèles tout au long de l’année…

Pour l’exploitant, il est encore plus difficile de trouver une solution à ce dilemme, car Pascal Miéville considère qu’il est de son rôle de promouvoir certains films moins en vue au niveau médiatique. Un des grands rendez-vous de l’année pour tous les cinémas en Suisse, c’est bien évidemment la Journée du Cinéma, début septembre, durant laquelle l’entrée coûte 5 francs. Lors de cette journée, la fréquentation est bien plus élevée, avec des clients qui viennent plusieurs fois pour profiter de découvrir des films qu’ils n’iraient pas forcément voir d’habitude. Ceci plaît beaucoup à Pascal Miéville, qui considère cette journée comme un succès, même si elle n’est pas particulièrement profitable sur le plan pécunier.

Le cinéma reste familial

Et l’avenir du cinéma en salles obscures, quel est-il? Cela fait des lustres qu’on évoque sa mort conséquemment à la domination d’Internet, la piraterie et les services de streaming du type Netflix ou de la future nouvelle plateforme Disney+. Cette dernière plateforme de streaming sera lancée à la fin de l’année aux USA.

Dans les mots de Pascal Miéville, le cinéma est presque devenu une sorte de «zapping»: on peut y aller à l’improviste, choisir un film le moment même, ou planifier le visionnage d’un film spécifique à une certaine heure, puis changer de plan à la dernière minute, parce que l’affiche du film de la salle d’à côté était plus belle. Ceci contribuerait entre autres à la baisse de fréquentation des cinémas mono-salles par rapport aux multiplexes au long de ces vingt dernières années, selon les statistiques fédérales.

De son côté, le gérant du cinéma de La Sarraz, Matias Fernando Dos Santos rappelle que: «le cinéma en salle reste une activité à part entière pour des familles qui ne veulent pas passer un dimanche après-midi chez elles devant l’ordinateur ou la télévision. Le cinéma constitue la possibilité de sortir et de vivre de bons moments ensemble.»

Les deux responsables reconnaissent les avantages financiers et pratiques du streaming, mais rappellent aussi les dimensions sociales, techniques et surtout émotionnelles, qui sont les caractéristiques des films partagés dans une salle de cinéma.

Selon les deux gérants, la salle obscure reste donc «un lieu essentiel». Un lieu qui, sans aucun doute, restera encore bien vivant durant cette année 2019 qui promet d’être grandiose!

Oscar Jordan

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