1820 – 2020, voilĂ  deux siĂšcles que des membres de la famille Zali sont arrivĂ©s Ă  La Sarraz. En prenant conscience de cet «anniversaire », Thierry Zali a Ă©prouvĂ© le dĂ©sir de faire partager une partie de cette aventure aux lectrices et lecteurs du Journal de la RĂ©gion de Cossonay.

TOUS UN PEU COUSINS: «Comme d’autres familles Ă  l’époque, les Motta, les de Dominici ou les Gabella par exemple, ils ont quittĂ© leurs vallĂ©es du Nord de l’Italie au dĂ©but du XIXe siĂšcle pour venir travailler ici comme peintres et/ou maçons. D’ailleurs, ils Ă©taient tous un peu cousins, proches ou trĂšs Ă©loignĂ©s. Certains ont fait des allers et retours, d’autres n’ont plus bougĂ©. Alors pourquoi les Zali, des Vaudois du PiĂ©mont, se sont-ils installĂ©s Ă  La Sarraz? Je n’en sais rien. Par contre la date de 1820 est sĂ»re. On m’avait dit aussi qu’ils avaient dĂ©barquĂ© Ă  Yverdon avant, mais je n’ai aucune preuve.» Quasi tous ces expatriĂ©s Ă©taient dĂ©jĂ  dans la construction au PiĂ©mont et ces professions se transmettaient toujours ainsi de pĂšre en fils ou d’oncle Ă  neveu. Ainsi, entre 1835 et 1837, un aĂŻeul de Thierry, Jean Zali, avait contribuĂ© Ă  la reconstruction du Temple de La Sarraz dans un style nĂ©o-classique bien caractĂ©ristique de l’époque.

VISITES À UNE GRAND-TANTE AVEUGLE: Les ancĂȘtres de Thierry Zali proviennent de l’Oro, minuscule village sans accĂšs goudronnĂ©, mais dotĂ© d’une chapelle baroque et d’un oratoire du 13e siĂšcle. Un endroit au milieu de bergeries surplombant la commune de Boccioleto, ainsi que celle de Civiasco dans la vallĂ©e voisine. C’est une rĂ©gion situĂ©e non loin du lac Majeur, un paysage fait de forĂȘts et de gorges entre les montagnes. Le pays conserve des habitations, avec les caractĂ©ristiques loggias et les couvertures en plaques de pierre des 16e et 17e siĂšcles.

«Enfant, je me souviens que chaque annĂ©e, Ă  PĂąques, nous allions trouver les grand-mĂšres et les cousines dans nos villages d’origine. Nous commencions par la tante de mon pĂšre, devenue aveugle et dont la fille s’occupait. Nous passions auprĂšs d’elle de maniĂšre dĂ©croissante
par rapport Ă  nos Ăąges. Dans l’ordre de cette «procession», il y avait tout d’abord mon oncle Baptiste, sa femme, ma tante Madeline et son Ă©poux, mon pĂšre RĂ©my, mes cousins Olivier, Etienne et Laurent, puis mon frĂšre Blaise et moi en derniĂšre position. Ce rituel m’impressionnait. Une fois, en me touchant le visage, cette aĂŻeule prononça le prĂ©nom RĂ©my en reconnaissant que j’avais une forme de tĂȘte semblable Ă  celle de mon pĂšre quand il Ă©tait petit. J’en ai toujours les frissons dans le dos en songeant Ă  cet Ă©pisode.»

INTÉGRATION RÉUSSIE: Selon la tradition, les hommes de la famille Ă©pousaient toujours les filles de leur rĂ©gion sauf un grand-pĂšre de Thierry Zali qui se maria avec une jeune femme de Saint-Prex, commettant ainsi «la premiĂšre entorse aux traditions familiales»!

Au fil des dĂ©cennies, par leur travail et leur savoir-faire, les diffĂ©rentes gĂ©nĂ©rations de la famille Zali ont petit Ă  petit dĂ©veloppĂ© leur entreprise et se sont retrouvĂ©s bĂątisseurs et propriĂ©taires de maisons et d’immeubles. C’est l’arriĂšre-grand-pĂšre de Thierry, Gian Battista (Ă  droite ci-dessous), qui prit la nationalitĂ© suisse, acte onĂ©reux Ă  l’époque. Ainsi, de par les circonstances, il se sont bien intĂ©grĂ©s, ont exercĂ© une certaine influence Ă  La Sarraz en participant Ă  la vie locale et Ă  ses sociĂ©tĂ©s. Il fallut aussi traverser la crise Ă©conomique de 1929, mais les rĂ©serves financiĂšres Ă©taient lĂ .

FÊTE DE L’ABBAYE DE LA SARRAZ: Thierry Zali Ă©voque divers thĂšmes au cours de la conversation, dont celui de L’Abbaye de La Sarraz oĂč, sur une photo d’époque (ci-dessous), on voit son grand-pĂšre Louis participer au cortĂšge. En 1998, Thierry est devenu lui-mĂȘme roi du tir, tout Ă  fait par hasard, ne tirant que tous les deux ans Ă  cette occasion. Il se rendit au stand juste avant la clĂŽture. AprĂšs trois premiers coups «pas terribles», son dernier tir fit s’agiter la cible. Il crut tout d’abord Ă  un dĂ©faut technique, mais les organisateurs lui dirent: «Mais non, coup centrĂ©, t’as fait un 100, t’es roi!» Bref, un trĂšs beau souvenir avec une rentrĂ©e le mardi vers deux heures
du matin!

À propos de ce grand-pĂšre Louis (en photo en page Une de ce journal), Thierry prĂ©cise que sa santĂ© n’était pas bonne. Avec sa famille et ses cinq enfants, dont deux dĂ©cĂ©dĂ©s prĂ©maturĂ©ment, il occupait les maisons du ChĂȘne 2 et 4.

DE LA ROUTE DE FERREYRES À NEW YORK: En prolongement de la Route de Cossonay, la Rue du ChĂȘne prend son nom tout de suite aprĂšs le franchissement de la Venoge et elle mĂšne au centre de La Sarraz. À peine le CafĂ© du ChĂȘne dĂ©passĂ© (actuellement propriĂ©tĂ© de Blaise Zali), en tournant Ă  gauche, nous distinguons le pont et la route de Ferreyres. Tout proche, se trouvent trois bĂątiments Ă©rigĂ©s par l’arriĂšre-grand-pĂšre Gian Battista (photo ci-dessous.) qui rĂ©sidait dans le premier, «une maison assez luxueuse avec plafonds dĂ©corĂ©s et escaliers peints en faux marbre. Ma tante me racontait que dans ce lieu, Ă  l’issue d’un mariage au Temple de La Sarraz, s’en Ă©taient suivis trois jours de fĂȘte et de bal.»

Dans une autre de ces maisons appelĂ©e Vaconda – construite Ă  l’époque sans vĂ©ritables plans – vivaient des demoiselles Ogiz, dont une s’était rendue Ă  New York, engagĂ©e comme nurse par la famille de H-C Frick, riche industriel, mĂ©cĂšne dans la peinture et initiateur de la Collection Frick sur la 5Ăšme Avenue. «Un jour, ce dernier envoya un tĂ©lĂ©gramme Ă  mon arriĂšre-grand- pĂšre pour lui faire part de sa satisfaction des bons services de Mlle Ogiz, lui demandant de bĂątir une maison pour cette dame.» Au terme de la construction, H-C Frick traversa l’ocĂ©an en bateau, puis atteignit La Sarraz en train, oĂč Gian Battista l’accueillit. Ils allĂšrent voir la maison et H-C Frick se montra si enthousiaste qu’il offrit les orgues du Temple!»

«Dans la deuxiĂšme maison construite par Gian Battista, vivait une autre demoiselle ayant quittĂ© La Sarraz il y a une cinquantaine d’annĂ©es pour s’occuper des enfants du couturier, Oscar de la Renta, un peu le Yves Saint-Laurent amĂ©ricain rĂ©sidant aussi Ă  New York. Ils restĂšrent trĂšs amis, elle passait mĂȘme ses vacances chez lui ou dans sa maison luxueuse de Saint-Domingue. Comme quoi, de la route de Ferreyres Ă  New York, il n’y a qu’un pas! Et je parle aussi pour moi, vu que j’adore cette mĂ©tropole», poursuit Thierry.

DES BÂTISSEURS: Les Zali, peintres, maçons ou entrepreneurs ont donc construit et rĂ©novĂ© quantitĂ© d’appartements de locatifs, de maisons villageoises, mais aussi des demeures luxueuses, des chĂąteaux et le Casino de La Sarraz. Toutes ces personnes Ă©taient devenues propriĂ©taires de biens immobiliers ici et lĂ  dans la rĂ©gion.

En ce qui le concerne, Thierry n’a jamais subi de pression quelconque pour assurer une relĂšve. C’était prĂ©disposĂ© que le frĂšre aĂźnĂ© reprenne l’entreprise. Pour sa part, mon interlocuteur adorait aller sur les chantiers avec son pĂšre RĂ©my le samedi matin et voir de belles maisons. En pensant Ă  ce papa, il l’évoque avec une certaine Ă©motion: «Il savait tout faire et, au niveau des couleurs et du feeling, il Ă©tait dotĂ© de dons innĂ©s. C’est lui qui m’a inculquĂ© cette approche de la beautĂ©. IntĂ©ressĂ© par beaucoup de choses, dont notamment le théùtre, il aimait jouer et il a Ă©tĂ© membre de la troupe des Faux-Nez. Avec son ami Roger Guibert, ils ont Ă©crit pas mal de revues. Sur ce thĂšme, je tiens encore Ă  citer Pierre Knebel et un autre personnage, le pianiste Papa Clot, de Cossonay, qui se faisait aussi remarquer Ă  la piscine de La Sarraz quand il sautait du plongeoir avec son maillot noir Ă  bretelles devant dater des annĂ©es 30!»

Reportage de Claude-Alain Monnard

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