Le peintre de Mont-la-Ville Ă©crit une carte postale d’un endroit oĂč il a posĂ© son chevalet. Aujourd’hui, le site du ChĂąteau de Vullierens.

À Albert,

Cher Albert,
Est-ce la blancheur des fleurs du cornouiller du Japon qui a attirĂ© mon attention? Il rĂšgne autour du chĂąteau une atmosphĂšre dĂ©licieuse et enchantĂ©e, une poĂ©sie florale exacerbĂ©e par le puissant soleil de cette matinĂ©e. Ici, pas de nains de jardin, mais des personnages et animaux sculptĂ©s qui surprennent le promeneur. Me voilĂ  suant (au propre comme au figurĂ©) face au chevalet, esquissant sur un fond bleu phtalo les contours de la maisonnette surplombant la vĂ©gĂ©tation. Pressant ensuite mes tubes de couleurs Ă  l’huile, j’extrais une pĂąte chaude qui se liquĂ©fie sur la palette.

Calme en dĂ©but de matinĂ©e, l’allĂ©e recouverte de gravier commence Ă  crisser sous le pas des visiteurs. Casquette vissĂ©e et lunettes sombres sur le nez, je demeure concentrĂ© Ă  l’intĂ©rieur de ma bulle. Il faut ça pour ne pas me perdre dans cette salade de verts, bleus et beiges. Des commentaires en français, en suisse-allemand et en anglais parviennent Ă  mes oreilles. Une prĂ©sence persiste sur ma gauche, Ă  l’instant oĂč je parviens Ă  Ă©voquer par touches vertes cadencĂ©es le feuillage de la partie basse du tableau. «Il ne faut jamais dĂ©ranger un peintre au travail », dit une voix. Et le monsieur se prĂ©sentant comme le propriĂ©taire du chĂąteau poursuit: «C’est ce que m’a dit ma femme il y a cinquante ans alors qu’un homme peignait dans le jardin». Cet homme s’appelait Oskar Kokoschka. RegonflĂ© Ă  l’évocation du grand artiste, je poursuis d’un pinceau lĂ©ger dans la chaleur Ă©touffante.

Gilles-Emmanuel Fiaux

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